Mathieu Lesourd
Laboratoire d’Etude des Mécanismes Cognitifs (EA 3082), Université de Lyon
Bases neurocognitives de l’utilisation d’outils : apport du fonctionnement normal et pathologique
Notre capacité à utiliser des outils a longtemps été réduite à l’activation de connaissances sur la manipulation (i.e., engrammes gestuels). Ces connaissances sur la manipulation contiendraient des relations égocentrées (i.e., main-outil), c’est à dire des informations propres au mouvement ou à la posture de la main associée à un outil (Buxbaum, 2001). Les connaissances sur la manipulation seraient stockées dans le lobe pariétal inférieur de l’hémisphère gauche et une lésion de cette région entraînerait des difficultés pour utiliser des outils (Buxbaum, Kyle, Grossman, & Coslett, 2007; Haaland, Harrington, & Knight, 2000; Van Elk, 2014). Cependant, des données récentes de la littérature ont remis en cause cette conception : c’est l’hypothèse du raisonnement technique (Osiurak, Jarry, & Le Gall, 2010, 2011; Osiurak & Lesourd, 2014). Selon cette conception, le lobe pariétal inférieur gauche n’encoderait pas de relations égocentrées mais des relations allocentrées (i.e., outil-objet) basées sur des connaissances mécaniques (e.g., Goldenberg, 2013; Reynaud, Lesourd, Navarro, & Osiurak, 2016).
Dans un premier temps, je présenterai des travaux qui remettent en cause l’hypothèse des engrammes. Je présenterai ensuite plus en détail les connaissances mécaniques (i.e., définition, spécificité et complémentarité par rapport à d’autres types de connaissances, etc.). Enfin je présenterai des études récentes sur l’utilisation d’outils dans deux pathologies neurodégénératives (maladie d’Alzheimer et démence sémantique) afin d’offrir un cadre explicatif alternatif aux engrammes gestuels à partir de l’hypothèse du raisonnement technique.
