Pierre Barrouillet
Professeur Ordinaire de Psychologie du Développement Cognitif à l’Université de Genève
Directeur des Archives Jean Piaget
L’oubli en mémoire de travail : Ses causes et ses remèdes
La mémoire de travail est un système central dont la capacité est limitée à la fois dans la quantité d’information pouvant être maintenue et le temps durant lequel cette information reste disponible pour le traitement. Bien que ce système mémoriel à court terme soit caractérisé par un oubli rapide de l’information, les causes de cet oubli demeurent depuis maintenant plus de 60 ans un enjeu théorique majeur et toujours débattu. Alors que certains auteurs suggèrent que cet oubli est dû au déclin temporel des traces mémorielles et à des phénomènes d’interférence, d’autres rejettent toute idée d’un déclin temporel et font de l’interférence la seule source d’oubli en mémoire de travail. Des options théoriques retenues pour rendre compte de l’oubli dépendent les hypothèses faites quant à la nature des mécanismes visant à en contrecarrer les effets. L’hypothèse d’un déclin temporel suppose des mécanismes de rafraîchissement des traces mémorielles déclinantes, alors que l’hypothèse d’interférence suppose des mécanismes de suppression des items interférents. Dans ce séminaire, je présenterai une série d’études récentes opposant les prédictions du Time-Based Resource-Sharing model (TBRS, Barrouillet & Camos, 2015), qui suppose l’existence d’un déclin temporel, à celles du modèle SOB-CS (Oberauer et al., 2012), qui fait de l’interférence la seule source de l’oubli en mémoire de travail. L’ensemble des résultats obtenus converge vers la conclusion qu’il est difficile de rendre compte des phénomènes d’oubli en mémoire de travail sans recourir à la vénérable hypothèse d’un déclin temporel à court terme des traces mémorielles.