Séminaire Marie Montant

Date: 
Friday, 28 April, 2017 - 11:00
Date fin: 
Friday, 28 April, 2017 - 12:30
Lieu: 
11 heures - LPC, Salle des Voûtes - campus St Charles - 13003 Marseille

Marie Montant
Laboratoire de Psychologie Cognitive
CNRS & AMU

Ce qui fait -et ne fait pas- le langage humain, S’interroger sur une trajectoire évolutive

Pour déterminer ce qui fait la spécificité – ou le caractère unique - du langage humain, une approche aujourd’hui classique consiste à rechercher chez les autres animaux les composantes élémentaires de cette faculté humaine. Ces composantes ou briques peuvent être de nature linguistique, anatomique, physiologique ou comportementale. Dans tous les cas, elles sont inspirées très précisément du modèle humain : il s’agit de trouver -ou non- des formes de traitement syntaxique, phonémique, un lexique, de l’intentionnalité, une aire de Broca, de Wernicke ou un faisceau arqué plus volumineux dans l’hémisphère gauche que dans l’hémisphère droit…. Au cours de cette présentation, je tenterai de montrer que cette approche comparative est vouée à l’échec dès lors que  les unités de comparaison - les composantes recherchées - sont fortement anthropocentrées. En effet, le système cognitif de chaque espèce animale étant le produit d’une histoire évolutive spécifique, d’une trajectoire, il se construit en réponse à un ensemble contraintes biologiques, environnementales, développementales et de contingences propres à chacune de ces histoires. Les composantes de ces systèmes cognitifs étant soumises elles aussi à un ensemble de contraintes, il est peu probable qu’elles se retrouvent à l’identique chez les diverses espèces.

Une alternative aux comparaisons inter-espèces fortement anthropocentrées serait peut-être de rechercher chez les animaux non-humains des composantes cognitives  domain-general , qui sont impliquées dans le langage humain mais aussi dans d’autres fonctions cognitives. Ces composantes domain-general sont, entre autres, l’apprentissage statistique, le fast mapping ou le chunking. Cette approche alternative permettrait d’expliquer les différences entre espèces non plus sur une échelle linéaire de valeurs au sommet de laquelle se trouve explicitement ou implicitement Homo sapiens mais plutôt en termes de configurations divergentes et non hiérarchisées entre elles. Sous cet angle, chaque système cognitif correspond à un assemblage particulier de composantes dont certaines sont présentes chez Homo sapiens, notamment les composantes domain-general lesquelles –selon ce scénario- auraient été co-optées ou exaptées chez l’humain au cours de l’évolution pour remplir la fonction de communication et de pensée. Il s’agit alors d’expliquer ce qu’il y a de spécial ou d’unique dans cette configuration humaine de composantes qui, elles, sont partagées par les autres animaux.

Mots clés : composantes du langage, domain-general, exaptation, trajectoire évolutive.